Les vertus du Ramadhan
- En préliminaire il faut rappeler que le prophète Mohammad (Paix sur lui) a interdit de poursuivre le jeûne sans interruption. Il faut jeûner aux heures et de la façon prescrites par notre Créateur et son Messager, ainsi donc le croyant percevra ses vertus.
- D’abord, Dieu rappelle ainsi au croyant sa totale dépendance envers Ses bienfaits, à lui accordés. Cela contribue à forger une certaine humilité mêlée de reconnaissance.
- Ensuite rien ne peut forcer mieux à la compassion envers les pauvres et les affamés du monde que le partage de leur expérience de faim et de soif. C’est en éprouvant ce que l’affamé éprouve dans sa quête de nourriture, ce que le pauvre éprouve en travaillant sans la quantité requise de nourriture, que le musulman peut concevoir ces notions, et répondra volontiers à l’appel du prochain affamé et du pauvre.
- Par ailleurs le corps humain accumule des toxines durant l’année, par son alimentation. Ces accumulations sont néfastes à la santé de l’individu. Le Ramadhan permet de nettoyer le corps de ces éléments là, et d’accorder un repos à nos organes digestifs.
- Il y a aussi un aspect unificateur propre au Ramadhan. En effet, riches ou pauvres, blancs ou noirs, tous les musulmans des 5 continents, soit environ 1 300 millions de croyants jeûnent, au même moment de l’année, de la même façon. Aucune dérogation n’est possible (sauf maladies ou raisons graves), cela leur donne une certaine sensation d’unité dans la même ferveur et soumission au Créateur Suprême.
Avant d’aborder le bénéfice suivant qui sera développé en détail, il faudrait ajouter, un aspect méconnu du Ramadhan.
- Après un long mois de jeûne et de privation diverses (nourriture, sommeil, relations intimes entre époux), beaucoup de gestes quotidiens que chacun faisait mécaniquement, ou des bienfaits que l'on prenait pour acquis, comme un dû, prennent alors une consistance nouvelle. Perceptions nouvelles, parce que, sensations nouvelles. Par ex. un verre d’eau rafraîchissant dans un moment de grande chaleur et les sensations agréables qu’il génère sont perçus plus finement par un corps qui en avait perdu l’habitude: forgeant ainsi une appréciation régénérée de ces bienfaits élémentaires de Dieu. Le même processus d’appréciation se répète pour un simple petit déjeuner, ou les repas quotidiens, forçant ainsi à la pensée de Celui qui a pourvu l’Homme de ces infinies bontés, à chaque première bouchée de nourriture. Et ce sentiment de gratitude effleure même la pensée du plus ingrat des croyants. C'est une sagesse formidable de la part de notre Créateur. Le croyant qui fait une pause pour réfléchir, trouvera, là, forcément une cause à remercier.
Leçon d’humilité...par notre Créateur élaborée!
- Sans prétendre passer en revue toutes les vertus du Ramadhan de façon exhaustive, finalement, Dieu, dans Sa Sagesse, veut que chacun éprouve toute la palette d’humeurs et sensations qui interviennent durant un jeûne, de sorte à aider l’être humain à mieux les contrôler. Et cela est d’une importance extrême, car, et nous allons le voir, cela influence profondément nos relations avec notre monde extérieur, notre prochain et nous-mêmes.
La clé est la maîtrise de nos émotions
Si on analyse la structure de notre personnalité, on y décerne principalement 4 dimensions, l’esprit, le corps, les émotions et l’âme.
Notre vie spirituelle, elle, résulte d’une intense interaction entre ces différents éléments de la personnalité. Elle est donc à la fois leur lien unificateur et leur résultante.
Pendant le mois de Ramadhan, Dieu requiert à chacun un ensemble de sacrifices. Cet ensemble est constitué de contraintes physiques, certes, mais aussi de contraintes sur le plan émotionnel, mental et spirituel. Ces 4 éléments sont indissociables et confèrent son caractère unique au Ramadhan.
Tous nous connaissons la chair et son pouvoir sur l’esprit à travers les émotions. Une émotion peut nous faire frissonner, une émotion peut nous faire rire, ou pleurer, et affecte notre humeur. Il est donc indéniable que chaque jour, nos émotions influencent notre esprit, et, de là, notre vie. Et vice-versa: notre mode de vie et ses péripéties, le monde extérieur, influencent grandement nos diverses émotions. Il y a donc une interaction complexe et rapide (en millième de seconde) entre notre corps, nos émotions et notre intellect..
Les émotions sont cependant la plus dangereuse partie de notre personnalité, car la plus vulnérable et la plus volatile. A l’inverse de l’esprit, qui raisonne sur des faits; les émotions sont constituées d’impressions abstraites: amour, haine, joie, peur, envie. Ces différentes notions ont été acquises au cours de notre vie; nous avons appris l’envie ou la jalousie, nous ne sommes pas nés avec.
Nos émotions sont conditionnées par le plaisir et la douleur: elles veulent éviter le désagréable, l’effort, et recherchent l’agréable, le confort. Et cela leur confère un redoutable pouvoir sur tout être humain...à son insu. Nous sommes rarement conscients de leur force, et combien elles affectent nos vies. Il existe des gens qui ne réagissent que par et pour les émotions: elles régissent leur vie.
Ainsi donc, le superficiel s’érige en dogme, et nous perdons l’essence de la foi.
La solution islamiqueAucune religion ne traite spécifiquement cette particularité et faiblesse de la nature humaine...à part l’Islam. Aucune.
L’Islam est la seule religion qui, non seulement propose, mais impose comme un des piliers fondamentaux de la foi, un processus de réajustement, de rééquilibrage, du corps et de ses composants. C’est une opportunité de réglage annuel!...A travers le mois sacré du Ramadhan.
Le Ramadhan est pour le croyant, il n’a pas été institué en l’honneur de Dieu.
C'est, pour l’Homme, une chance inouïe, de rééquilibrer sa personnalité...Malgré l’opposition du corps.
Refus physique et biologiqueQuand le corps reconnaît notre violation de son habitude alimentaire, il commence une révolte bien orchestrée.
Pour avoir une idée combien le corps et les émotions sont prêts à “se battre” contre le vécu du Ramadhan, il suffit de se rappeler d’une expérience que beaucoup d’entre nous ont déjà enregistrée, dans leur vie.
Il nous est souvent arrivé, d’être en retard en se réveillant le matin, et de se dépêcher pour ensuite arriver à l’heure, en oubliant même de manger quoique ce soit avant de partir. Notre intention n’était pas de jeûner pour Dieu, mais simplement d’être à l’heure. Alors pris par nos différentes responsabilités, nous oublions souvent de manger jusqu’à un moment avancé de la journée. Sans même que le corps nous rappelle à l’ordre. Vrai ?
Cependant, durant le Ramadhan, dès les premières minutes de la journée, le corps s’assure que nous sommes bien conscients du conflit interne qui va se développer. Et il nous envoie des suggestions de ce genre: un ami perdu de vue, qui ne vous a jamais invité, tout à coup vous invite au restaurant, ou, vous êtes dans les affaires et les bonnes affaires se traitent souvent autour d’une table, alors on vous invite. Là, vous êtes embarrassé de dire que vous jeûnez! Parce que votre relation se dira “c’est quoi encore ces pratiques d’un autre âge?”. Ainsi donc, on est tenté de se dire qu’après tout pourquoi pas? Le Coran m’autorise à rattraper ensuite, après le Ramadhan, alors histoire d’être sociable, je vais accepter et remplacer ce jour de jeûne après le Ramadhan.
MAIS, votre esprit vous dit, “cher ami, je crois que tu as déjà promis cette journée à Dieu: aucune nourriture, ni boisson, ni cigarettes, ni vitamine, du lever au coucher du soleil. Vas-tu laisser tomber Dieu?”
Et l’esprit domine la chair et les émotions.
Ainsi, donc, Dieu a élaboré le Ramadhan dans Sa grande Sagesse afin de nous pourvoir, d’une période suffisamment longue pour un rééquilibrage des dimensions biologiques, mentales, émotionnelles et spirituelles de sa personnalité.
Alors dans ce processus long de 30 jours, la volonté et l’esprit se renforcent. Nous restons mobilisé en permanence. Nous arrivons à contrôler nos émotions et à les confiner à leur rôle. Nous reprenons les rênes de notre vie progressivement, les émotions ne sont plus les vecteurs directeurs de nos actions et de notre personnalité. Et après 30 jours de cette autodiscipline systématique de renforcement de notre esprit sur le corps, le croyant est prêt pour une nouvelle année.
Nous avons pu ainsi rééquilibrer les rôles de chaque partie de notre personnalité. Nous n’avons pas tué nos émotions, on les a simplement remis à leur place: de fugaces impressions qui peuvent nous aider, mais ne doivent pas nous diriger.
Nous arriverons ainsi à une discipline de contrôle de nos accès émotionnels (colère, peur, envie...). Discipline qui nous sera profitable, on s’en doute bien, toute l’année.
Le fait de résister à la nourriture au nom de valeurs spirituelles, nous aide tous à transcender à la fois le corps et les émotions pour se ressourcer et renforcer notre résistance à la tentation.
Comment vit-on le Ramadhan?Tous les musulmans jeûnent pour Dieu, pour respecter son commandement. Et cela lui est compté comme piété. Car le jeûne est un acte dont seul Dieu peut percevoir la sincérité. Il n’est pas écrit sur le front du musulman qu’il jeûne, tout comme chacun peut très bien boire ou manger à l’abri du regard des hommes.
Dieu comblera tous les croyants d'une récompense pour ses sacrifices.
Nonobstant ce fait, il y a moyen de potentialiser encore plus le Ramadhan, ce que chaque musulman averti ne manque pas de faire.
C’est un moment unique d’introspection et de recherche de défaut dans notre personnalité, et donc forcément des faiblesses résultant de nos émotions.
Les émotions, comme expliquées, sont générées par les sensations de plaisir et de peine, le corps se nourrit de produits organiques. L’esprit est nourri par des idées, la lecture, la connaissance. Seules ces dernières peuvent renforcer notre esprit et notre capacité de raisonnement.
La plus grande avenue ouverte à la tentation est l’ignorance.
C’est pourquoi le premier message qui vint au prophète Mohammad (Paix sur lui) fut de lire (IKRA). Toutes sciences émanent de et ramènent à Dieu, nous dit Dieu, dans le Coran.
L’esprit, la raison est la clé de notre personnalité. Et même de notre vie spirituelle: Dieu dans le Coran n’impose aucune obligation aux simples d’esprit. Qu’est-ce à dire? C’est très profond et révélateur cela. Réfléchissons.
Cela veut dire qu’en Islam, le premier critère d’exigence de la foi est la Raison. Nul ne peut exiger la foi de celui qui n’a pas la Raison: c’est la condition sine qua non. C’est extraordinaire. C’est vous dire la place que l’Islam donne à la Raison! Que ceux qui clament une antinomie entre Sciences et Islam, y réfléchissent.
Le musulman essaiera de bannir toute perturbation émotionnelle.
Bien sûr, il n’est de propos, ici, d’en faire une liste exhaustive, mais une analyse synthétique des phénomènes fondamentaux qui alimentent nos émotions.
Le jeûneur évitera les discussions vaines et stériles qui ne font qu’exacerber des nerfs à peine ensommeillés. D’ailleurs, après quelques jours de jeûnes, il devient naturel d’économiser ses gestes et ses paroles. On se détache progressivement de l’agitation mondaine, gagnant chaque jour, ainsi, en indépendance et en sagesse.
L’esprit est contaminé par certains programmes de TV, où sont exposés violence, sexe, vices divers. C’est vrai que cela alimente...les émotions par des sensations. La TV brise nos structures de valeurs, et ses images programment et contrôlent notre personnalité. Cela n’est plus à démontrer.
Le croyant profite du Ramadhan pour éteindre la TV, et instaurer un dialogue dans la famille, pour enrichir la qualité de vie en famille.
Toutes les grandes nations, avec tout leur argent, toutes leurs universités, tous leurs grands départements de recherche, n’ont pas pu se protéger elles-mêmes contre ces images destructrices. Le musulman a la chance d’avoir le seul mécanisme, connu, pour purifier corps et esprits: c’est le Ramadhan. Institué, pour l’Homme, par un Créateur Omniscient.
Cependant, ne pas manger, et, ne pas lire, ne pas prier, ne pas rester en contact avec Dieu...cela n’est PAS jeûner, c’est s’affamer; tout simplement. Ce n’est pas le but du Ramadhan.
Il y a une différence qualitative entre s’affamer et jeûner.
Se priver d’aliment, c’est s’affamer.
Le jeûne existe lorsqu’une personne se prive volontairement de nourriture et de boisson et accompagne ce choix avec une volonté, et une interaction avec son Créateur Miséricordieux, à travers la prière, les pieuses lectures et la méditation.
En transformant la faim du jeûne en vecteurs de prière, de réflexion, de soumission, le musulman accroît, nécessairement, sa force spirituelle, de là, sa force de caractère, son pouvoir de raisonnement, sa capacité d’analyse, bref la qualité de sa vie intérieure.
Les potentialités du jeûne sont énormes et sous-estimés par la communauté scientifique, c’est une fenêtre sur l’autodiscipline et l’introspection, à la portée de chaque croyant. C’est une école où chaque croyant apprend la faim qu’éprouve le pauvre pour y être plus sensible, une école où se forge la sagesse du sage, la paix du cœur et la lumière de l’esprit par la recherche de la proximité du Bien Aimé.
Certains penseront que c’est là une version idéaliste, voire édulcorée, du Ramadhan, et que la réalité en est bien en deçà. Peut-être...Cependant même si l’intégralité des musulmans ne tire, peut-être, pas du Ramadhan les bénéfices escomptés, cela n’occulte en rien les sagesses inhérentes et intrinsèques aux prescriptions du Ramadhan: des musulmans seraient alors en cause, pas l’Islam, ni ses divines prescriptions.
Le jeûne du Ramadhan met “le sacrifice” en perspective, dans notre quotidien. Ainsi donc, il ne s’agit plus de “sacrifice”: c’est la force de la foi qui enlève à l’acte son caractère sacrificiel et contraignant. Forgeant ainsi, en chaque croyant, consciemment ou inconsciemment, de nouvelles habitudes louables de piété. C’est même un signe de jeûne réussi.
Puissent les jours bénis du Ramadhan, qui viennent et qui reviennent, apporter au monde: paix, sérénité, justice...comme le fait la voix du Mouazzim (muezzin), sereine et mélodieuse, du haut des minarets, lorsqu’elle se pose sur un peuple prosterné dans le soleil déclinant, soumis Seul au Seigneur des Mondes...
Utopie? Peut-être. Mais même si un tel souhait n’a que le poids d’une chimère dans notre présent chaotique, il n’en conserve pas moins toute la valeur de sa sincérité et l’intensité d’un vœu ardent.
Mais, Dieu sait mieux.
Mohammad Amine ALIBHAYE