C'est drôle comme les gens pour qui on a peu d'estime peuvent parfois être d'un grand secours. Ainsi, en ce moment, pour passer ma déprime postélectorale, j'ai une solution en or, je pense à un tas de nouveaux amis du nouveau locataire de l'Elysée.
Non, je ne cherche pas à être cruel, rassurez-vous, je ne songe absolument pas à me moquer de l'impayable panel de chevaux sur le retour qui servent désormais d'écurie culturelle au pouvoir.
C'est sûr, ils sont flamboyants. Souvenez-vous, le premier soir, M. Sarkozy avait à peine vendu au pays un nouvel élan vers une France jeune et dynamique qu'il en retrouvait sur la place de la Concorde les hérauts, Mireille Mathieu, Enrico Macias.
Je ne tiens pas non plus à mettre en cause ce pauvre M. Bolloré, dont le modeste petit cadeau - trois jours sur un yacht à 200 000 euros la semaine - a fait couler tant d'encre. Cela me forcerait à revenir sur une polémique souvent injuste. Les gens se sont scandalisés qu'en si peu de temps un type qui citait Jaurès en montant sur les bidons dans des usines se soit métamorphosé en une sorte de Berlusconi à cheveux se pavanant sur un yacht de parvenu.
Et après ? Le patron de l'UMP a fait toute sa campagne en promettant que sous son règne, enfin débarrassé des scléroses socialo-chiraquiennes, on pourrait s'enrichir rapidement : il avait juste oublié de préciser que ça ne concernerait que lui personnellement, on ne va pas faire une maladie pour un détail ! Et puis il y eut, durant cette controverse, de vrais bons moments.
J'ai adoré cette repartie spontanée, un matin sur France-Inter, de M. Seillière, le Jean-Marie Bigard du Medef : « Pourquoi faire reproche à M. Sarkozy d'aller sur un yacht, la reine d'Angleterre aussi en a un ! » C'est vrai ! Par rapport aux quelques envieux incapables de se payer mieux que le village vacances ( en gros 59, 99 millions de Français ), une petite barcasse à 17 cabines cela paraît beaucoup, mais par rapport aux véritables méritants de ce bas monde, Elisabeth II ou l'émir de Bahreïn, trois jours à 400 000 euros, c'est à peine un Apéricube.
Et qui a souligné les moments terribles qui ont dû assombrir parfois cette escapade dès lors qu'on a raconté dans les journaux qu'elle servit aussi à préparer la composition du futur gouvernement ? Vous imaginez l'horreur ? Votre fils Louis, penché sur le bastingage, vous appelle, horrifié : « Papa ! Il y a une drôle de méduse avec un accent de Toulouse qui essaie de s'accrocher à la coque ! », et vous n'avez que le temps de lui hurler : « Retire l'échelle de coupée, malheureux ! C'est Douste-Blazy qui vient pleurer pour avoir un poste ! »
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Je ne reviens pas non plus sur les cas difficiles sur un plan économique et social dont le nouveau président aura à s'occuper. Pour réussir à éponger discrètement l'ardoise fiscale de Johnny Hallyday, il faudra se décider : dans quel budget couper ? Celui de l'aide au tiers-monde ou celui de la culture ? Et puis il faudra trouver un poste convenant à Doc Gynéco ( avec un nom pareil, où le nommer ? à la Santé ou à la Condition de la Femme ?). Mais contenter Steevy sera aisé : quand on lui parle de lui confier un portefeuille, il pense qu'il s'agit de garder les sous d'un type parti aux toilettes.
A dire vrai, depuis l'autre dimanche, je pense à une autre catégorie de gens, je pense à la joyeuse bande des Séguéla, des Hanin, des Tapie, des Besson, à toute la troupe d'opportunistes et de tourneurs de veste que l'on voit aujourd'hui faire le siège d'un Elysée qu'ils connaissent bien, ils en ont servi tous les maîtres.
Certains sont doués, il faut le reconnaître. M. Georges-Marc Benamou expliquait sans rire, la semaine passée, au « Parisien » qu'il avait eu
« un coup de foudre amical » pour l'actuel président dès le début des années 1990, c'est-à-dire à un moment où il n'avait même pas encore songé à poignarder M. Mitterrand, une de ses victimes précédentes : et pour cause, il ne le connaissait pas encore.
Certains sont plus ballots. M. Allègre se voulait discret. Las, il est tombé sur une caméra de France 2 au moment même où il sortait de l'état-major de campagne du candidat de droite, saloperie de paparazzi ! Mais tous sont très utiles, ils sont notre phare, notre boussole dans la tempête. Il suffit de garder espoir en leur veulerie : ils ont trahi, donc ils trahiront. C'est cela qui nous rappelle que le sarkozysme est mortel. Ouf !
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(Extraits de la Presse)