Un islam uni pour mieux dialoguer ?

Sujet: Un islam uni pour mieux dialoguer ? 2007-05-02, 08:22

La constitution allemande prévoit que l'Etat traite de manière identique toutes les religions. Mais pendant longtemps, l'islam a été délaissé. Le conseil de coordination des musulmans, créé le mois dernier, va lui servir d'interlocuteur auprès de Berlin.
Toutes les semaines, les chrétiens allemands peuvent suivre « La parole du dimanche » à la télévision, une courte émission religieuse. Depuis le 20 avril, les musulmans d'Allemagne ont aussi leur émission, disponible sur le site internet de la SWR. Mais la chaîne publique ZDF a annoncé son attention de la faire figurer au plus vite sur ses programmes du vendredi, le jour chômé de l'islam.
Une avancée considérable pour les musulmans, mais aussi pour la société allemande toute entière. Car selon la constitution (art. 3), l'Etat est tenu à traiter de manière identique toutes les religions. Mais comment appliquer cette disposition quand il manque un interlocuteur fiable et légitime du côté des musulmans ?
Comment, par exemple, garantir que les écoliers musulmans recevront, comme les écoliers chrétiens, un enseignement de l'islam dans les établissements publics, quand personne ne s'entend sur la teneur des programmes ou même la qualité et la formation des professeurs (des laïcs, des imams, des spécialistes de l'islam ?). Pendant longtemps, l'islam d'Allemagne a donc payé sa division. Et l'Allemagne piétiné sa loi fondamentale.
Le 11 avril, tout a changé. Quatre des plus importantes organisations musulmanes d'Allemagne (*) se sont regroupées en conseil de coordination (KRM). Certes, assez conservateur, il est loin de représenter les 3,2 millions de musulmans vivant dans le pays, « tout comme les syndicats ne représentent pas tous les travailleurs », rappelait dernièrement un éditorial du journal Tageszeitung.

Une conférence sur l'islam
commence aujourd'hui au
ministère de l'Intérieur

Mais la rapide création de « La parole islamique » sur SWR suffit à taire toutes les critiques. En quelques semaines, on s'est accordés sur le contenu et sur le choix du premier auteur du court prêche diffusé : Aiman Mazyek, secrétaire général du conseil central des musulmans en Allemagne, a parlé du pardon et de la pitié ; cette semaine, il sera question de « la nécessité du dialogue ».
Un thème d'actualité, car aujourd'hui, pour la deuxième fois en moins d'un an, Wolfgang Schäuble convoque à son ministère de l'Intérieur une « conférence sur l'islam ». Quinze représentants de l'islam et quinze représentants de la société allemande pour débattre de la place de cette religion en Allemagne. Conformément à ce que leur promet la constitution, les musulmans veulent maintenant plus que des mosquées (l'Allemagne en compte 2500). L'automne dernier, la conférence avait fait un flop : trop de divisions côté musulmans, organisation hasardeuse côté allemand (pas d'ordres du jour clairs et, gaffe, des pauses cafés en plein ramadan !).
Un nouvel échec risquerait de mettre à mal les jeunes bases du dialogue islamo-allemand. Point positif : les musulmans du KRM arrivent avec une feuille de route. Le gouvernement allemand aussi sait où il souhaite avancer, par exemple sur le problème de l'absentéisme des filles en cours de natation ou de biologie.
Mais attention, répondent les représentants de l'islam laïc conviés à la conférence. Pour Ezhar Cezairli, dentiste, une des deux seules femmes invitées à Berlin, «considérer le KRM comme seul interlocuteur mettrait à mal l'idée même de cette conférence ». Déjà quatre musulmans laïcs ont menacé de quitter la table. Berlin est sur le fil du rasoir.